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TRIBUNE. Commémorations du génocide arménien annulées : "24 avril, la douleur du confinement"

La 105e commémoration du génocide arménien ne pourra pas se dérouler vendredi 24 avril, comme chaque année, en raison du confinement. Président du Comité de défense de la cause arménienne, Jules Boyadjian appelle à ne pas oublier les victimes.

Rédaction JDD
Manifestation après les commémorations du génocide arménien, le 24 avril 2019 à Paris.
Manifestation après les commémorations du génocide arménien, le 24 avril 2019 à Paris. © Sipa

Voici la tribune de Jules Boyadjian, président du Comité de défense de la cause arménienne : "Le 24 avril, les commémorations du génocide arménien ne pourront avoir lieu. A Los Angeles, Beyrouth, Moscou, Montréal, Athènes, Paris et même Erevan, les centaines de milliers de descendants de rescapés du génocide arménien qui manifestent chaque 24 avril à travers le monde seront privés, cette année, de leur droit de revendiquer justice et d'honorer la mémoire de ceux que l'on a voulu rayer de l'histoire de l'humanité.

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Quelle ironie de constater qu'un virus, aussi contagieux soit-il, ait obtenu davantage de résultats que plus d'un siècle de politiques négationnistes actives d'un Etat au gouvernement paranoïaque. Ce virus dont a succombé l'un des plus éminents avocats de la cause arménienne en la personne de Patrick Devedjian, serait-il le complice tant espéré de la Turquie? Il y aurait de quoi alimenter les thèses conspirationnistes.

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Priver les Arméniens de leur droit de cité un 24 avril, c’est d'abord leur ôter une partie d'eux-mêmes

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Il faut dire que le mensonge d'Ankara ne prend plus et que la Turquie est isolée dans son déni. La machine négationniste s'est enrayée au point que le Congrès américain a reconnu le génocide des Arméniens en 2019, quelques mois après que le Président Macron a inscrit par décret, le 24 avril, au calendrier des cérémonies républicaines. Le négationnisme était même chahuté au cœur de ses racines ancestrales, en Turquie, où plusieurs grandes voix de la société civile, écrivains, militants des droits de l'homme, citoyens engagés, avaient, en 2015, porté la reconnaissance du génocide arménien au point de déstabiliser les fondements de l'Etat profond. C'était avant la dérive autocratique d'Erdogan, porté par une alliance des extrêmes – nationalisme et islamisme – et son acharnement à l'égard des minorités, en particulier les Kurdes.

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Si, au cours des cent dernières années, le 24 avril s'est si profondément ancré dans l'âme des Arméniens – qu'ils soient en outre, Français, Américains, ou autre – c'est que toute l'indignation au monde ne pouvait venir à bout du mensonge d'Etat. Pour bousculer le monstre, il fallait qu'on lui opposât l'esprit de résistance, devenu une aspérité structurante de la culture des descendants du génocide. Priver les Arméniens de leur droit de cité un 24 avril, c’est d’abord leur ôter une partie d’eux-mêmes.

C’est aussi les entraver dans l’expression légitime de leurs inquiétudes et de leurs exigences. Aujourd’hui encore, plus d’un siècle après les faits, le grand architecte du génocide, Talaat Pacha est toujours célébré en héros national gratifié d’un mausolée en son honneur sur la colline de la liberté à Istanbul. Point de reconnaissance sans réparation.

 

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Pour les descendants du génocide des Arméniens, l'isolement et le confinement n'auront jamais été aussi insupportables

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En France, des candidats aux élections municipales ont été positionnés sur des listes soutenues par les grandes formations politiques françaises, après avoir proféré des pamphlets négationnistes. D'autres encore ont refusé de s’exprimer sur le génocide arménien, dans un silence pour le moins troublant. Le tout, sans réaction des formations qui les avaient investis et qui en furent pourtant informées. Et que dire de l’Arménie qui, semaine après semaine subit les tirs incessants de l’Azerbaïdjan (fidèle alliée de la Turquie), au Haut-Karabakh où les Arméniens se défendent pour leur survie, et en Arménie-même où les villages à l’intérieur de frontières pourtant reconnues par la communauté internationale sont pris d’assaut dans l’indifférence générale, y compris celle des autorités françaises.

Combattre le Covid-19, c’est renoncer à une partie de nos libertés pour préserver l’essentiel et soutenir l’extraordinaire ouvrage des soignants. Mais pour les descendants du génocide des Arméniens, l’isolement et le confinement n’auront jamais été aussi insupportables qu’en cette journée du 24 avril."

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